Soirée du lundi 26 avril : Le billet d'humeur de Jean Pierre

Publié le par philippe


26 avril 2010
Il faisait tellement beau ces derniers jours, si doux qu’on aurait cru une fin d’été. Une atmosphère de quiétude inaccoutumée. Le soir les passants cherchent un peu le silence des ombrages.
Devant la porte du verre-à-soi on se sentait presque mollasson. J’ai failli filer tout droit jusqu’à la rivière.  Mais il aurait fallu emmener les copains et tout le matériel…
Pas beaucoup de monde. Le décor a changé. Dylan a enlevé les canapés. Samuel, Philippe et Quentin se sont presque dévoués pour monter le chauffage sur la scène avec All a long watch tower, du Dylan si musical qu’on se love dedans avec gourmandise. Un global-trotter qui n’emmène pas ce genre de bonbons en voyage est un mec perdu. J’ai pensé aux roseaux des bord de Drôme, à cent mètres de là. Suis sûr qu’ils ont frémi un instant de bonheur. Violette est venu danser ses mots avec sa petite voix passionnée. Quelques jeunesses ont pointé leur nez dans l’arène, comme des suricates intrigués.
Puis Ignazio est venu semer un joli boogy, ça mange pas de pain et ça remue un peu nos fesses flémardes. Je regrette quand même l’absence des canapés où l’on se vautrait les uns contre les autres. Encore du blues. Le gros dos d’Ignazio s’est voûté et Philippe a compris qu’il voulait l’emmener ailleurs. Pas manqué, les accords ont glissé sur un tango. Philippe souffre un peu mais ça donne. Enfin ils nous ont fait une valse un peu blusée sur des fioritures mauresques. Nous on est là, dans une passivité tropicale, tandis que Phil et Ignazio discutent tranquillement technique. Ça tourne en véritable sketch de salon. Rires bonhommes.
C’est vrai que le blues, ça coule comme du miel, du mille fleurs, avec un indien qui vole discrètement au-dessus de la savane qui trompe énormément. Le blues, c’est du chant géo-culturel, sans frontière, et fragile comme les lucioles dans la nuit.
Après quelques négociations courtoises avec les voisins amis qui se lèvent tôt, c’est l’heure des guitares sèches. Nous, on va boire ensemble notre coucher de soleil au bord des pétales de Vilolette qui, soudain inspirée, nous sort une espèce de chanson réaliste des Karpat. J’ai mes cordes sensibles qui se mettent à vibrer. Puis Quentin nous emmène à la rame sur l’étendue irlandaise d’une vieille chanson tant aimée. J’ai dans les yeux la rivière qui arrange ses paillettes lunaires entre les frênes et les robiniers du japon, juste là, derrière mes paupières.
Belle soirée pleine de douceur. Dehors, l’air prodiguait ses caresses de mai.
Qui a dit que les musiciens modernes étaient de arracheurs de cordes ?…
 
Jean-Pierre Treille

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